Témoignage d’Eglantine – Vivre 34 ans avec … et découvrir … suivit de : Échange épistolaire

Témoignage d'une victime de mannipulateur pervers narcissiqueTout a commencé par une rencontre, comme beaucoup de rencontres, plutôt jolies, plutôt sympathiques. On discute, on s’aperçoit qu’on se plait … et on avance … on chemine sur un sentier qui nous mènera vers une vie de couple.

C’est ce qui m’est arrivé avec mon mari depuis 32 ans, mon compagnon depuis 34 ans. Je savais que je ne l’aimerai jamais autant que j’avais aimé auparavant. A 19 ans passés, j’avais rencontré un jeune homme que j’avais aimé follement et lorsqu’il m’avait quittée un mois avant mes 20 ans, j’ai eu la conscience aiguë que jamais je ne retrouverais un tel amour, ce qui s’est produit. Il m’avait fallu des mois pour me remettre de ce chagrin.

Trois ans plus tard, j’étais en « ménage » avec un homme de 17 ans mon aîné, la différence d’âge s’explique mais c’est une autre histoire … ou la même.

Les premières années se sont bien passées, j’étais assez amoureuse, mon mari aussi, il avait des activités musicales, je l’accompagnais à certaines, tout a été pour le mieux dans le meilleur des mondes pendant  à peu près 7 ans. Nous travaillions tous les deux, moi fonctionnaire, lui dans une grande société sur un poste de cadre.

Au bout de ces 7 années, une prise de conscience s’est faite en moi. J’avais 30 ans, je n’avais pas d’enfant et je sentais mon horloge biologique commencer à s’affoler un peu.

Je me souviens que lorsque j’avais 25 ans j’avais dit à mon mari, « bien sûr je ne veux pas d’enfant maintenant, mais il arrivera un jour où j’en voudrai peut-être un ». Il m’avait répondu clairement qu’il n’en voudrait pas d’autre mais qu’on verrait si ce moment arrivait …

Sauf que je suis femme, et qu’à 32 ans, j’avais quand même mis deux ans à me rendre de l’évidence de mon besoin d’enfanter, j’ai fait part à mon mari que je ne pouvais plus continuer d’entretenir une contraception qui était contre ma volonté. Donc j’ai tout arrêté et il a dû prendre en charge ce côté-là car il n’était pas question que j’assume une contraception dont je ne voulais pas, ne voulais plus.

Et j’ai attendu 4 ans de plus avant que mon mari finisse par se décider. Il m’avançait des arguments matériels contre la venue de cet enfant, alors que j’étais dans le sens de la vie … et un jour je lui ai dit que je ne pouvais plus continuer ainsi, soit il se décidait, soit je partirai, ce que j’aurais fait, il me connaît suffisamment bien.

Ma fille est arrivée quand j’avais 37 ans …

Les premières années se sont relativement bien passées, mais dès qu’elle a été en âge de tenir une conversation sensée, à savoir très tôt car elle est à haut potentiel, il s’est passé comme un transfert de l’amour que mon mari me portait sur ma fille. J’ai souvent pensé en voyant cette espèce de transfert se faire qu’il n’était pas capable d’aimer plus d’une personne à la fois.

Mais j’aurais dû me méfier, car je me souviens lui avoir dit avant de franchir le pas de la relation sentimentale : « Mais tu n’as jamais aimé personne … »

C’est à se demander.

A partir de ce moment-là et bien plus encore à partir de sa retraite, la vie de couple s’est mise à dérailler. Mon mari a arrêté sans que je sache pourquoi toute relation sociale, il n’aime pas les relations sociales. J’ai arrêté de travailler sur sa demande en lui indiquant bien que je ne pourrais pas rester sans activité, car si lui peut rester seul, pas moi, j’ai besoin de voir du monde et d’échanger. Il avait répondu que je pourrais faire des activités bénévoles.

Ce que j’ai fait … d’abord en tant que trésorière d’association, en tant que parents d’élèves … bref, je me suis engagée socialement.

Et à partir de ce moment, habitant une petite commune, j’ai été repérée pour faire partie comme membre entrant, de la liste sortante pour les élections municipales. Je me suis retrouvée conseillère municipale, puis adjointe au maire.

Et les difficultés ont réellement commencé.

Mon mari n’a jamais accepté que je parte de la maison pour m’occuper de la commune, de la vie communale et faire avancer les dossiers. Il aurait préféré que je reste à la maison à faire quoi, on se le demande un peu puisqu’il ne proposait jamais rien : ni sortie, ni exposition, ni promenade … rien …

N’étant plus avec ma fille que ses seules relations humaines, il a commencé à observer tout ce que je faisais dans la maison, à faire des remarques plus ou moins agressives, à se placer plutôt dans l’intimidation et voyant que ça ne marchait pas vraiment, à se positionner en victime. C’est ainsi que selon lui j’ai toujours raison … sauf que la vie se passe comme il veut lui et non moi, sauf que tous les autres sont des imbéciles, sauf que je ne vois plus personne puisque nous ne recevons jamais aucune visite.

C’est le point qui aurait dû m’alerter beaucoup plus jeune, quand lorsque nous recevions un peu de famille, il se montrait très désagréable. A tel point, que après deux ou trois fois, je n’ai plus lancé d’invitations car c’était absolument invivable et si loin de l’idée que  je me fais de recevoir …

Et les choses ont continué de s’aggraver peu à peu, notamment depuis la retraite où toute relation sociale avec l’extérieur a cessé ; ce n’est pas faute d’avoir essayé de dire à mon mari qu’il existait des centres d’intérêt, rien ne l’attirait, il voulait être tranquille me disait-il. Et entre temps, j’étais devenue élue de ma commune et il lui était facile de dire :  « il faut bien que quelqu’un reste à la maison … »

Je ne prends aucun plaisir à me sentir épiée en permanence, ça me conduirait plutôt à faire quelques « bêtises » sous le regard de l’autre ! Mais je me sens épiée en permanence et je sais que son regard me suit quand je m’active en cuisine, je le vois me suivre, et je ne pense pas être atteinte de paranoïa …

Il occupe par ailleurs une place dans la cuisine en permanence, ce qui fait que lorsque j’arrive pour préparer le repas, je le dérange, et il me le fait savoir en soupirant très nettement, l’hiver et l’été il tient les volets fermés en permanence pour éviter ou le froid ou la chaleur de rentrer …. Aussi sitôt que je rentre, notamment l’hiver, j’ouvre les volets et il les referme sitôt que j’ai le dos tourné …

Par ailleurs, ma générosité naturelle énerve particulièrement mon mari. Quand ce don s’adresse à lui, passe encore mais quand il concernait ma mère par exemple, le peu de fois où elle est venue à la maison, ça lui était carrément insupportable de voir que je donnais à une autre personne que lui.

Il était par conséquent absolument odieux ce qui fait que ma mère n’est jamais revenue et que les vacances sont devenues obligatoires dans la région où elle habite, car nulle question pour moi, ni pour ma fille de  nous priver de voir mère et grand-mère. C’est un point sur lequel je n’ai jamais cédé.

C’est assez réussi pour gâcher le reste des vacances c’est ce qui s’est passé, toutes les périodes de congés se passent près de ma mère, sans être chez elle, dans une ville où j’ai vécu 40 ans et pour laquelle je n’ai pas d’attaches particulières, aimant bien plus d’autres villes que celle-là.

Par rapport à ma fille,  il a réussi, je crois à intégrer mon don, en se positionnant dans le « plus » à savoir donner plus que moi, mais je ne suis pas dans une course. Il ne s’agit pas de donner plus que l’autre, il s’agit d’aimer … d’aimer en complémentarité père-mère ou mère-père …

Qu’est-ce qui fait que aimant et donnant, on se retrouve à subir au bout de quelques années une situation tout sauf enviable, sans avoir a priori un profil de victime, car il n’aurait pas fallu que mon mari lève la main sur moi, ne serait-ce qu’une seule fois, il aurait eu ou aurait ses affaires dehors dans l’immédiat, et il le sait. Sauf que j’ai le sentiment très net aujourd’hui d’être victime de … quoi exactement … le mot pervers vient vite à mon esprit.

J’avais la nette impression d’être dans une sorte de maltraitance psychologique à m’entendre dire des choses peu justes … avec agressivité …

Je me suis rendue compte que je suis sous une forme d’emprise, qui me déplaît mais dont je ne sais pas comment me défaire. Mon gros souci est que ma fille est dans la même contrainte.

Ayant pris conscience de cet état de fait, nié pendant longtemps, connu pendant des années mais faisant avec … arrive le moment où je ne peux plus continuer de faire « avec ».

Je sais que j’ai préservé l’essentiel de ma personnalité en partant souvent de la maison pour mes fonctions municipales. Ma vie est en dehors de la maison ce qui n’est pas vraiment normal mais il faut exister pour soi-même.

Maintenant arrive le moment de franchir le pas pour délier cette emprise … et là, je fais face à la paralysie, je me sens complètement démunie.

Églantine

Échange épistolaire

Réponse à la Victime de manipulateur perversJ’ai lu ta lettre avec beaucoup d’attention, et beaucoup de tristesse par rapport à cette vie si grise que tu décris, et surtout si enfermée … tu ne m’en avais jamais parlé … Tu es plus souvent dans l’aide envers les autres, parlant peu de toi.

Je vais reprendre au fil du texte si tu veux bien.

Avant même de reprendre tes mots et de les commenter, je vais commencer par te poser une question de fond : Aimes-tu ton mari ?

Tu n’es pas obligée de répondre à cette question, l’important étant que toi tu la connaisses ; cette réponse.

Tu pourras ou non donner suite  à cette question ainsi qu’à toutes celles qui vont suivre, nous sommes en amitié, pas en interrogatoire … donc ressens une complète liberté par rapport aux questions, conseils qui vont se succéder. Encore une fois, on est en amitié, en aide, rien d’autre.

Tu dis lorsque tu abordes la question de l’enfant, que ton mari n’en voulait pas d’autres … Qu’en est-il ? Il avait manifestement des enfants avant de te connaître, combien ?

Et sa relation avec sa compagne ou sa femme avant toi ?  Que t’en avait-il dit ? Que ressens-tu par rapport à cette relation, par rapport à son ancienne compagne, où était le problème, comment leur séparation est-elle intervenue ? Peux-tu en tirer des informations ?

Ensuite, tu effleures le sujet de ta fille, qu’en est-il de tes relations avec elle ?

Qu’as-tu ressenti au moment où tu as pris conscience que ton mari était plus aimant envers ta fille qu’envers toi ?

Est-elle une source de forces pour toi ? Que ferais-tu pour elle ?

Il me semble comprendre que tes relations avec ta fille,  au travers de ce que tu dis, que ces relations semblent bonnes voire très bonnes. Qu’en est-il réellement ?

Enfin, pour aborder la question qui te tracasse à te savoir « démunie », voire paralysée, je vais te donner ou essayer de te donner, si tu veux bien, quelques pistes.

Tu ne fais aucune référence à l’aspect financier de ta vie. Est-ce que vous êtes dans votre vie financièrement à l’aise ou pas.

Si oui, peut-être est-il temps d’ouvrir un compte en banque à ton nom, ton seul nom …

Si non, c’est un peu plus compliqué, mais il faut quand même ouvrir ce compte à ton seul nom, avec une autre adresse que celle de ton domicile. Demande une attestation d’hébergement à une de tes connaissances de confiance, amie, ou famille … et choisis une banque autre que celle où le compte du couple est domicilié. La question des finances reste un point à prendre en compte car c’est souvent une des faiblesses du type de personne que tu décris en la personne de ton mari … D’ailleurs, comment est-il ? Économe, dispendieux ? Est-ce lui qui gère les finances ?

 A voir cette piste … l’explorer bien à fond … mais étant peu intéressée par les aspects pécuniaires, je ne peux pas t’aider plus avant …

Les choses ne doivent pas bouger rapidement, prépare doucement ton départ si tu souhaites partir, prépare le tranquillement mais de façon très secrète, très organisée en prenant le temps, …

As-tu parlé à d’autres que moi de la situation ? Si oui, fais-le, fais-le autant que tu pourras auprès de personnes de confiance. Si non, fais-le rapidement, décharge ce fardeau, ne garde aucune fierté par rapport à cette situation, elle ne ferait que t’encombrer.

Tu fais allusion à un mandat électoral, mais à côté, est-ce que tu travailles et si oui, comment ? A temps complet ? A temps non complet ? Explore cette piste …

Toujours concernant ton époux, as-tu repéré ses zones de faiblesse ?

Tu dis qu’il t’épie, oui mais tout le temps ? Ne dort-il jamais ? Y a-t-il des moments dans la journée où il n’est pas là, où tu peux organiser des rangements, classements, en dehors de son regard ?

As-tu des ami(e)s de confiance à qui tu pourrais confier des objets t’appartenant et qui te tiennent à cœur : bijoux, lettres, photos, sans pour autant dans un premier temps que ton mari s’aperçoive de l’absence de ces objets, sois prudente …

As-tu pensé à sauvegarder ce qu’il y a sur ton ordinateur, sur une clé USB par exemple que tu aurais toujours sur toi.

Dans ce qui t’appartient, pose-toi la question de savoir ce qui te tient le plus à cœur. Ça peut n’être pas grand-chose, mais pose-toi vraiment cette question … et sauvegarde …

Pour terminer, tu dis avoir pris conscience de cette situation très récemment. Il y a toujours un effet catalyseur. Il a eu lieu chez toi.

Peux-tu me dire comment tu as réalisé ce que tu vivais et comment tu as réussi à poser le mot perversion ? Sans indiscrétion aucune, évidemment, uniquement si tu as envie de dire, si ça te fait du bien … de dire …

 Élisa, ton amie.

Il y a plusieurs années, j’aurais répondu oui à la question aimes-tu encore ton mari, maintenant je sais que ce n’est plus le cas, depuis longtemps déjà. Subir une pression quasi quotidienne, se sentir en stress en agissant dans la maison, et entendre des remarques injustifiées ou proférées d’un ton où perce une agressivité importante oblige à mettre de la distance entre l’autre et soi. Je sais aujourd’hui que je ne l’aime plus. Je poursuis en réponse aux autres interrogations.

Mon mari a été marié une première fois et a eu deux enfants de son premier mariage. De sa femme, il me disait qu’elle avait toujours l’air d’avoir perdu son chat la veille, cela est vrai, cette femme a un air triste sur elle en permanence, mais il reste que mon mari a dû partir pendant plusieurs mois pour une formation professionnelle et que pendant ce temps, la femme qui était son épouse, s’est libérée de son joug. Elle a évolué socialement ce qui n’a pas convenu du tout à mon mari et il a pris ses distances et est parti une première fois, puis une seconde.

Pour ce qui concerne ma fille, nous avons ensemble ce qu’on pourrait appeler presque une relation fusionnelle. Nous avons des rapports de mère à fille évidemment, mais aussi nous discutons beaucoup de divers sujets, et heureusement, car enfant différente avec deux ans d’avance par rapport aux autres élèves, il lui a été toujours difficile de s’intégrer au groupe classe … j’ai toujours une image d’elle en école maternelle, enfant extraterrestre atterrie par inadvertance dans le monde des humains …

Elle est à la fois très forte et très fragile, nous discutons beaucoup ensemble, heureusement car elle est aussi très enfermée.

Pour ce qui est de l’aspect pratique, c’est là où je commence à me sentir moins bien et très embarrassée à ne savoir par où commencer … Ouvrir un compte, oui pourquoi pas, mais où ? Me faire domicilier chez qui, c’est assez difficile à demander ce genre de choses … En fait, je ne sais pas par où commencer, par quel bout je dois commencer à tirer la corde qui dénouera les liens … pour poursuivre sur le concret par rapport au compte en banque, je vais chercher, mais pas de personne de confiance à ce point dans mon environnement mais peut-être … par rapport à l’ordinateur, j’ai tout ce à quoi je tiens sur des clés USB qui sont dans mon sac à main … quant à savoir ce qui me tient le plus à cœur sur le plan matériel, peut-être tout ce qui me permet de sauvegarder le lien avec l’extérieur : téléphone, ordinateur, et l’appareil photo car j’aime prendre des photos …

Pour continuer sur le quotidien, ce n’est pas facile d’échapper à son regard, il est la plupart du temps dans la cuisine mais lorsqu’on est ensemble avec ma fille, il est fréquent qu’il vienne voir, uniquement voir ou sous un prétexte futile, qu’il vienne parler à ma fille … Il est comme omniprésent dans la maison à écouter tous les bruits, et les identifier, à savoir quand on sort, si on a bien refermé la porte, …

Enfin pour aborder et finir sur le point qui a fait catalyseur, c’est en fait une belle histoire, une très belle histoire.

Il y a 38 ans, bien avant de connaître mon mari, j’étais follement amoureuse d’un jeune homme qui avait 22 ans, moi j’en avais 19. C’était un amour profond, intense,  partagé, jamais consommé, …. un amour fou qu’on ne rencontre qu’une seule fois dans sa vie.

En 1976, en tout début d’année, le jeune homme  a rencontré une autre jeune fille et s’en est allé en février 1976, ….. un mois avant mes 20 ans.

J’ai mis plus de deux ans à m’en remettre, j’étais dévastée, complètement perdue, et quand je partais pour l’université pour des journées de rencontre trimestrielle avec les professeurs, ma mère se demandait toujours si j’allais revenir tant j’étais désespérée. Elle avait horreur de ces journées. C’était en 1976 et 77, un an après … encore …

Je savais par ailleurs que jamais je ne retrouverai cette intensité, cette puissance, cette fraîcheur dans le sentiment d’amour, ……. ce qui s’est révélé exact, jamais retrouvé.

Je savais aussi, quelque part, qu’il me recherchait … depuis. Je ne l’ai pour ma part, jamais oublié et ai toujours recherché sa trace, sans que ce soit fréquent, mais de temps à autre.

Il y a quelques semaines, alors que je rentrais chez moi, plus tôt que prévu le matin, je ne suis jamais chez moi vers 11 h le jeudi matin,  je me suis connectée sur Internet, sur ma messagerie et j’ai vu un message d’un site de retrouvailles d’anciens amis, sur lequel je m’étais inscrite il y a cinq ans. Habituellement je détruis systématiquement ces messages sans les regarder, sauf ce jour-là.

Ce jour-là donc, j’ai vu :

« Bonjour Églantine,

ça fait un moment…« 

C’était lui ….

Ce même jour, nous avons échangé, après ma première question qui a été de lui demander s’il avait réussi sa vie, question qui est venu en écho à ma dernière phrase lorsqu’il m’a quittée, lui souhaitant d’être heureux …..

… « non pas vraiment« …. a été sa  réponse. Cette réponse est venue me frapper en plein cœur ….

Depuis, après s’être dit que nous ne nous étions jamais oubliés, que nous nous étions toujours recherchés, lui plus que moi, souvent, très souvent  jusqu’en octobre 2012, nous avons continué d’échanger et retrouvé en soixante-douze heures l’intensité des émotions et des sentiments que nous partagions il y a 37 et 38 ans avec la même fraîcheur, et des ressentis complètement partagés, nous nous sommes retrouvés à l’unisson. C’est absolument renversant et  bouleversant sur le plan émotionnel, et sur un plan plus vaste, ça remet en cause la vie qu’on s’était plus ou moins projetée …. et ça fait se lever un formidable espoir.

Il y a 37 ans, un mois avant mes 20 ans, il me quittait. Cette année, un mois avant les 20 ans de notre fille, il revient …. Ma fille, que j’ai eue à 37 ans …. Pour les personnes qui croient au destin, ça s’appelle une destinée…

Je pourrais te raconter bien d’autres choses, par exemple, une vie sentimentale peu réussie pour lui et beaucoup, beaucoup de souffrances, une recherche fréquente de moi, une évolution en miroir entre nous sur beaucoup de plans,  des soucis de santé assez similaires, jusqu’ici mais les choses bougent rapidement, des anniversaires personnels non fêtés ….. Je pourrais te dire également qu’on se retrouve dans l’écriture,  il écrit très joliment … en prose, en vers …

Nous nous écrivons, nous téléphonons mais ne nous sommes pas encore revus…. Il y a quand même quelques précautions à prendre …. au moins se revoir quelques fois avant d’agir.

Il reste que je suis mariée, ne l’oublie pas même si ma vie de couple est considérablement vide depuis très longtemps … je sais seulement aujourd’hui que je ne vieillirai pas avec mon mari, en prenant toutes les précautions dues à son âge et au fait que je vis avec lui depuis 34 ans … Mon mari ne pose aucune question, car selon certaines il ne peut pas ne pas voir, mais il n’est pas encore temps de dire …

Voilà pour ce qui est de cette belle histoire, aujourd’hui des prises de conscience de mon côté, entre la réalisation d’une perversion, la réalisation que ça ne peut pas continuer ainsi quoiqu’il se passe avec mon ami, et d’autres prises de conscience un peu moins inconfortables mais troublantes quand même font que je suis en latence.

Du coté de mon ami, il y a une maladie sérieuse, la conséquence est que nous sommes dans un temps suspendu …

Je ne peux pas aller vers lui sans avoir réglé les problèmes avec moi-même, vivre un quotidien depuis tant années laisse des traces … sur la personnalité, aggrave le manque de confiance, aggrave l’angoisse intrinsèque d’abandon … il faut que je me prenne en compte et que je rassemble mes morceaux épars même si j’ai préservé l’essentiel …

Et puis il y a ces liens à défaire qui me posent des problèmes car encore une fois, je ne sais pas par quel bout prendre la corde épaisse qui m’enserre.

 

Églantine